Dignité

ETRE AUTISTE DANS LA DIGNITE 

Nous avions passé un moment chez le père de L. discutant d'un projet commun. Un peu avant midi, il nous dit qu'il devait aller avec L. chez les grands parents de L. pour le déjeuner. En même temps qu'il nous congédiait, il montra à L. une carte où était dessinée une voiture, puis une autre carte avec la photo des grands parents et enfin une dernière carte avec un dessin d'une assiette et des couverts. L. ne semble pas content, il sort de sa poche une carte avec une image de gâteau, puis celle montrant un frigidaire. Son Père insiste et lui remontre la série d'images, "voiture", "grands parents", "repas"... L. montre avec véhémence sa carte "gâteau" et tire son père vers le frigidaire... Comme son père insiste il trépigne et fait un caprice...

Scène banale? Presque, mais L. est autiste, il est aussi sourd. Et pourtant, il a bien compris ce que voulait son père, il a bien su lui faire comprendre ce qu'il voulait, et comme son père insistait il a fait un caprice, comportement on ne peu plus normal, un vrai caprice de petit garçon.

Le droit d'être autiste dans la dignité

Toute la philosophie de notre mouvement parental, "AUTISME FRANCE", en matière de choix de prise en charge de l'autisme, repose sur cette idée fondamentale: tout faire pour permettre à une personne autiste de conserver toute la richesse de sa personnalité mais en lui donnant les moyens de participer au maximum à la vie sociale avec dignité. Nous pensons qu'il est de notre devoir de permettre à toute personne autiste, en fonction de ses capacités, d'exprimer ses besoins de manière autonome, d'avoir un maximum d'indépendance dans ses activités privées ainsi que dans ses activités sociales. Nous pensons également que la meilleure façon d'arriver à cette fin, est une éducation individualisée, respectant la personne dans ses différences, avec ses possibilités d'évolution et tenant compte de ses difficultés spécifiques.

Cette position est fondée sur une analyse des connaissances récentes sur le syndrome autistique et une étude approfondie de la situation actuelle des personnes autistes.

L'autisme dysfonction cérébrale

Personne ne connaît encore, à l'heure actuelle les causes de l'autisme. Il semblerait que la condition autistique, qui peut prendre des formes extrêmement variées, soit d'origine organique poly-factorielle. Avec les progrès des recherches on distingue petit à petit des sous-groupes avec des étiologies probables différentes: accidents dans la période néonatale, problèmes métaboliques, anomalies chromosomiques connues telles que le "X fragile", facteurs génétiques observés dans les études familiales ou biologiques, etc.

La plupart des recherches actuelles sur les causes de l'autisme, s'orientent donc vers des facteurs organiques variés. Plusieurs résultats ont été publiés confirmant toute une série d'hypothèses sur les aspects organiques de l'autisme. Il n'y a pas pour le moment de théorie générale de l'autisme, il semble d'ailleurs peu probable qu'il y en ait une un jour, compte tenu de la diversité des formes d'autisme.

Toutes les études épidémiologiques ont en revanche montré qu'il n'existait pas de corrélation entre l'autisme et l'environnement familial. L'hypothèse que l'autisme pouvait être causé par une mère "réfrigérateur" a été abandonnée depuis longtemps par la plupart des spécialistes de l'autisme. Elle reste toutefois très vivace dans les milieux psychanalytiques en France et dans quelques pays latins. De nombreux parents subissent encore les accusations des psychiatres, à peine voilées au mieux. Les témoignages de parents à ce sujet, sont généralement accablants et souvent révoltants.

En l'état actuel des connaissances, on ne sait pas guérir l'autisme[1], pas plus qu'on ne sait guérir la Trisomie 21.

A partir de ce constat devons nous avoir une attitude fataliste? Absolument pas. Quand nous disons que l'on ne peut pas guérir de l'autisme, nous disons que d'un point de vue médical, et en l'état des  connaissances présentes, nous n'avons pas de thérapie capable de traiter l'autisme. Certains symptômes peuvent être atténués par des médications particulières, ou par des thérapies spécifiques, mais la personne autiste reste autiste et le plus souvent avec les traits autistiques les plus lourds à supporter. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de traitements des problèmes auxquels ont à faire face les personnes autistes et leur entourage, mais qu'il faut aller chercher ces traitements en dehors du domaine médical.

La situation actuelle des personnes autistes:

Nous commencerons par examiner le cas des personnes autistes à l'âge adulte car  c'est le plus souvent là que les carences de prise en charge pendant l'enfance et l'adolescence vont avoir les effets les plus dévastateurs. Nous examinerons ensuite celle des enfants.

Comment en est on arrivé là avec les adultes autistes?

Dans la plupart des cas, en France, ces personnes autistes ont été prises en charge, durant leur enfance, par les services des hôpitaux psychiatriques[2]. Ces derniers, fondant le plus souvent leurs approches sur les théories psychanalytiques de l'autisme, ont considéré qu'il suffisait de séparer l'enfant d'une mère "pathogène" pour qu'il "sorte de son autisme". Il convenait donc de ne pas intervenir, et d'attendre "l'émergence du désir" de participer,  d'entrer en contact avec les personnes de son environnement.

Pour les cas les plus sévères, "l'émergence du désir" ne se manifestait pas... Arrivé à un certain âge, ils étaient renvoyés à leur famille avec le commentaire "Echec thérapeutique, désolés...". Dans certains  cas, au vu d'un croisement du regard, ou à l'écoute de quelques mots prononcés, un cri de victoire sur l'autisme était clamé, ignorant le reste des symptômes, qui font pourtant partie des critères de définition de l'autisme, en dehors du repli autistique. Mais au delà de cette querelle de mots, il se trouve que ces traits sont fort souvent ceux qui handicapent le plus la personne autiste.  Cette dernière est donc rendue "guérie de son autisme" à sa famille, mais toujours aussi handicapée...

Quelques cas de personnes autistes assez peu sévèrement touchées, sont aussi passées par ces services hospitaliers. C'est le plus souvent ceux pour lesquels on entent parler de "guérison". Pour certains, une intégration peut même avoir lieu. Malheureusement, même parmi ces cas le manque de travail sur les compétences sociales et la communication font que l'on en retrouve parfois dans des MAS[3] à cause de leurs troubles du comportement.

Les résultats de ces prises en charge passées sont catastrophiques. Un grand nombre de ces adultes n'ont pratiquement aucune autonomie personnelle, et encore moins d'autonomie sociale. Ils n'ont en général pas de moyen de communication pour pouvoir exprimer leurs besoins et ne comprennent pas le monde qui les entoure, même au niveau le plus élémentaire. Ils n'ont pas acquis de compétences sociales et donc le plus souvent ils ne savent pas ce qu'on attend d'eux ni nous faire savoir ce qu'ils attendent de nous.

Les parents se retrouvent avec un adulte dont ils ont été séparés presque entièrement, qu'ils ne connaissent que très mal, les personnels hospitaliers ne donnant en général aucune information sur les activités à l'hôpital. Cet adulte est sur-handicapé par le manque d'apprentissage au niveau de l'autonomie et au niveau des compétences sociales de base. La plupart vivent un enfer et la cellule familiale est détruite. Nous pensons que ce genre de situation, héritée du passé, est intolérable. Nous ne nous étendrons pas ici sur ces cas dramatiques car ils font l'objet du corps de ce document.

Qu'en est-il maintenant de la situation des enfants autistes?

Malheureusement, dans un très grand nombre de cas, le scénario décrit ci dessus se répète pour les tout jeunes enfants autistes aujourd'hui qui font le même par cours que leurs aînés, et auront vraisemblablement les mêmes résultats... En effet, si dans quelques hôpitaux les prises en charge commencent à inclure parcimonieusement un petit contenu éducatif, il reste un très grand nombre de services hospitaliers qui en sont restés aux théories psychanalytiques pures et dures et qui perpétuent les erreurs du passé.

Les récits désastreux qui nous parviennent de parents de jeunes enfants, à propos de la manière dont ils ont étés traités par certains psychiatres, provoquent malheureusement un "flash back" dramatique pour nous, car ils nous rappellent nos propres souffrances mais de plus nous donnent un sentiment de  désespoir: avons nous donc combattu toutes ces années pour en rester là?

Ce qui est dramatique c'est que le placement en hôpital de jour est quasiment systématique, en France, pour les enfants autistes. On nous accuse de vouloir monopoliser les prises en charges de l'autisme avec les approches éducatives alors que nous demandons simplement d'avoir le droit de donner à nos enfants une alternative à la prise en charge Psychanalytique. Les parents qui essaient de créer une structure éducative voient leurs projets rejetés presque systématiquement par les instances psychiatriques locales. Nous demandons seulement de pouvoir envisager et mettre en place d'autres prises en charges que celles qui nous sont jusqu'à présent imposées dans la plupart des cas. Comme nous le verrons plus loin, il s'agit de prises en charges ayant fait leurs preuves, respectant la personnalité des individus autistiques, et non pas d'un choix fantaisiste de parents non informés.

Les autres prises en charge

Comme nous l'avons dit plus haut, il existe des alternatives à la prise en charge médicale de l'autisme, et en particulier à la prise en charge psychanalytique. Elles ne sont pas toutes acceptables, soit parce qu'elles sont éthiquement indéfendables, soit parce qu'elles n'ont qu'une efficacité limitée ou incertaine. Autisme France a déjà exprimé dans sa "Position de Principe" une très ferme opposition à toute prise en charge faisant appel à des méthodes aversives. Les renforcements négatifs (punitifs) sont non seulement inacceptables d'un point de vue éthique mais dangereux à long terme car ils créent un climat de violence que la personne autiste assimile à une situation normale...

Nous avons également condamné les approches par trop contraignantes soit sur les personnes autistes elles mêmes, comme par exemple la "Holding therapy", soit sur l'environnement de la personne autiste, comme certaines méthodes intensives exigeant une présence active continue des parents ou amis. Ces méthodes sont proches de celles dont nous doutons de l'efficacité, en effet elles demandent des astreintes importantes en matière d'emploi du temps, pour un taux de réussite assez faible. Enfin nous avons dénoncé les méthodes "miracles" prétendant avoir guéri des personnes autistes par des approches plus ou moins farfelues, voire inspirées de démarches mystico-magiques...

Point de vue sur la "guérison" de l'autisme

Une discussion passionnante[4] à laquelle participaient plusieurs personnes autistes dites "de haut niveau", a récemment eu lieu sur le thème de la "guérison de l'autisme", de sa prévention par les recherches génétiques et de son élimination par des approches comportementales.

Des parents et des professionnels parlaient de "conseil génétique" et de la possibilité, grâce à ces conseil, d'éviter d'avoir un enfant autiste en avortant de l'embryon. Les personnes étaient bien conscientes du fait que de tels conseil génétiques étaient pour le moment bien loin d'être disponibles. Ils discutaient de l'intérêt de faire des recherches qui, un jour pourraient les permettre. D'autres parents et professionnels discutaient, eux de méthodes comportementales, certains les approuvant, d'autres y étant opposés. Les personnes autistes participant à ces discussions firent remarquer que ces dernières étaient franchement désagréables pour les personnes autistes: <<Vous êtes entrain de dire devant nous que si vous aviez la possibilité de connaître le risque d'autisme avant la naissance vous auriez provoqué un avortement, mais que, comme vous n'aviez pas cette possibilité, vous essayez de nous modifier pour nous enlever notre autisme... En voulant nous éviter, nous modifier, nous guérir de l'autisme, vous niez notre droit à la différence, vous voulez vous débarrasser de nous.>>

Ceci est un condensé de plusieurs interventions venant de plusieurs personnes autistes. Ces personnes reconnaissaient que certains aspects de leur autisme étaient très difficiles à vivre, mais que d'autres étaient une partie importante de leur personnalité qu'ils ne voulaient pas voir disparaître. Il est bien évident que cette attitude est plus facile à défendre dans leur cas, avec un autisme assez léger. Toutefois cette position nous a permis de mieux formuler une pensée que nous ressentions dans notre rejet des approches purement comportementalistes ou dans certaines approches pharmaco-thérapeutiques: le respect de la personne autiste exige autre chose que la pure élimination des symptômes autistiques.

Il est nécessaire de pouvoir apporter à la personne autiste que nous avons en charge, en tant que parent ou en tant que professionnel, les éléments qui lui permettront de bâtir elle même et à son niveau, si modeste soit il, une vie correspondant à ses aspirations, tout comme nous le faisons avec un autre enfant, en lui apportant, au travers de l'éducation, les bases de cette construction.

Le choix de l'approche éducative

Nous avons donc cherché des approches qui seraient acceptables d'un point de vue éthique, dont l'efficacité ait été suffisamment testée et dont la durée ait permis une évaluation à long terme. En effet, une méthode qui donnerait satisfaction pendant l'enfance pour laisser la personne autiste démunie à l'âge adulte ne saurait être recommandée.

Nous avons aussi cherché des méthodes ayant fait l'objet d'un suivi universitaire ou scientifique qui soit le garant du sérieux des propositions de prise en charge, mais aussi de l'évolution des concepts sous tendant les approches. Seules les approches éducatives spécifiquement adaptées à l'autisme satisfaisaient ces critères d'éthique et de qualité.

Nous avons eu la chance que des pionniers aient exploré le terrain avant nous et nous fournissent leur longue expérience, qu'il s'agisse du modèle anglais mis en place par la NAS (National Autistic Society, association anglaise des parents d'enfants autistes) en étroite relation avec des chercheurs du MRC (Medical Research Council) fonctionnant depuis plus de vingt cinq ans, ou du programme TEACCH de Caroline du Nord, rattaché à UNC (University of North Carolina) ou encore des approches plus directement comportementalistes de type ABA.

Nous nous sommes également inspirés d'expériences plus limitées au Danemark, au pays Basque Espagnol, en Suède, dans d'autres états des USA et en Belgique, où une adaptation du Programme TEACCH aux besoins Européens avait déjà été faite. Les programlmes d’intervention intensive précoce de type ABA sont entrain d’être expérimentés en Europe.  A la différence de nombreuses approches, les programmes éducatifs pratiqués en Angleterre ou en Amérique du Nord sont évolutifs. Ils prennent en compte les apports récents des travaux de recherches sur l'autisme et étudient les expériences variées faites au niveau de base, de manière à éventuellement pouvoir s'en inspirer. Cela est pour nous très important car une approche qui n'évolue plus se sclérose ou se transforme en dogme, dans les deux cas elle devient dangereuse.

Enfin, la participation des parents dans la mise en place des programmes éducatifs nous parait être la clé de voûte de toute approche cohérente de l'autisme. Compte tenu des très grandes difficultés de généralisation propres aux personnes autistes, il est extrêmement important que parents et professionnels coopèrent dans l'effort éducatif, sans pour autant demander aux parents de devenir des éducateurs ni aux éducateurs de prendre des attitudes parentales.

L'éducation pour les personnes autistes c'est quoi au juste?

Nous avons déjà évoqué quelques uns des grands principes qui inspirent toute l'approche éducative de l'autisme. Il nous faut maintenant entrer un peu plus dans  le détail. Notre but général est d'apporter à chaque personne autiste un bagage  lui permettant de participer au maximum de ses capacités, mais aussi de ses besoins, à la vie du monde qui l'entoure. Il sera toutefois nécessaire de voir comment ce but peut être atteint.

En tout état de cause, l'approche éducative ne peut se concevoir que de manière très individualisée. En effet il existe de telles différences entre les personnes autistes qu'il est impossible d'envisager un programme éducatif universel, fonctionnant avec toutes les personnes autistes. Il y a toutefois des traits communs, partagés à des degrés divers par les personnes autistes, nous y reviendrons ultérieurement.

Avant d'établir un programme éducatif pour une personne autiste il faut tout d'abord évaluer ses possibilités d'apprentissage, puis en fonction de son âge et de ses besoins et en se plaçant à son niveau de compréhension on établira un programme qui lui permette d'acquérir soit des compétences, soit des connaissances, qui pourront lui être utiles dans son évolution vers une plus grande autonomie individuelle ou sociale future.

Cette évaluation est en elle même un signe de respect pour la personne autiste.  Elle nous permet de nous placer à un niveau de communication ni trop bas, ni trop haut. Elle nous permet de proposer des exercices éducatifs ni trop simplistes ni trop complexes. Elle nous permet enfin d'apprécier le travail effectué à sa juste valeur: quoi de plus difficile à vivre dans ce cadre que de voir un travail dans lequel on a mis tout son cœur et son talent, mal ou peu apprécié?...

Au niveau de la communication on s'aperçoit que si l'on emploie un mode de communication correspondant au niveau que l'on a évalué, l'établissement de la relation devient plus facile... Quand on ne sait pas se situer par rapport à la personne autiste, on court le risque soit de lui parler avec un langage trop complexe, qu'il ne comprend pas et qui le stresse, soit avec un langage trop simple, qu'il ressent comme une insulte à sa dignité. Au fur et à mesure qu'il fera des progrès, nous pourrons utiliser un mode de communication de plus en plus riche, adapté à son niveau de compréhension. L'éducation va s'appuyer sur des évaluations successives, de manière à suivre les évolutions de la personne. On tiendra bien sur compte de l'âge chronologique de la personne dans la détermination des priorités dans les apprentissages.

Contenu de l'éducation

De la même manière que pour tous les enfants, les buts pédagogiques évoluent avec l'âge des personnes autistes. Chez les tout jeunes enfants, on mettra plus volontiers l'accent sur des acquisitions pouvant servir de base à des apprentissages ultérieurs. Au fur et à mesure que l'on s'approchera de l'âge adulte, la part des apprentissages plus orientés vers des situations de la vie courante ira croissant.

Tout aussi naturellement, on impliquera progressivement de plus en plus les choix de la personne autiste dans les activités éducatives, comme on le ferait avec un autre enfant, à mesure qu'il devient de plus en plus capable de les faire et de les exprimer, s'il le faut à l'aide de moyens alternatifs de communication. Nous voyons ici reparaître notre idée fondamentale qui est d'aider l'enfant autiste à construire, au travers d'une éducation appropriée, les bases qui lui permettront de devenir autonome dans ses choix de vie en ouvrant au maximum l'horizon de ses possibles: il n'y a pas de choix sans une connaissance des alternatives et sans le moyen d'exprimer sa préférence pour l'une d'entre elle.

Ceci ne s'adresse pas qu'aux personnes autistes ayant un relativement bon ou très bon niveau de langage. En fait, ces apprentissages permettant de développer la capacité à déceler des alternatives, à reconnaître des situations parmi d'autres, font partie des buts de l'approche éducative même pour les autistes de bas niveau. Eux aussi ont droit de savoir ce qui va se passer: où les emmène-t-on par exemple, au supermarché? A l'école? à la piscine? C'est d'autant plus important pour eux que leur compréhension de l'environnement est plus limitée et qu'ils ne peuvent souvent pas déduire ce qui va se passer à partir du contexte. Il est aussi extrêmement important que les personnes autistes de tout  niveau puissent avoir les moyens de nous exprimer leur d‚sirs ou leurs choix. Une très grande partie de l'approche éducative consiste précisément dans le développement des moyens de communication dont va pouvoir disposer une personne autiste.

Comment s'y prend-on

L'approche éducative Utilise les méthodes Comportementalistes sans se limiter à ces dernières. Elle va bien au delà du schéma "Behavioriste" stimulus-réponse pour s'intéresser au dysfonction cognitives elles mêmes, au delà d'une observation superficielle des comportements et de leur modification directe.

L'hypothèse de base que nous avions aussi exprimée dans notre position de principe est que nous ne pensons pas que l'enfant autiste, et plus tard l'adulte autiste, ne veut pas participer, mais qu'il ne peut pas ou a de grandes difficultés à participer. Contrairement aux théories psychanalytiques de l'autisme, qui affirment qu'il s'agit d'un trouble émotionnel et que le replis autistique de l'enfant est une manifestation du fait qu'il NE VEUT PAS entrer en contact, nous faisons l'hypothèse d'un déficit cognitif [5]spécifique à l'autisme, souvent accompagné d'une déficience mentale.

Cela conduit à une attitude radicalement différente vis à vis de l'enfant, ce n'est pas qu'il ne VEUT PAS, c'est qu'IL NE PEUT PAS ou qu'IL LUI EST TRES DIFFICILE d'entrer en contact avec nous ou avec son environnement. Ses frayeurs, ses angoisses sont les manifestations de ses difficultés à comprendre les règles qui gouvernent son environnement.

Il va donc falloir se mettre à sa portée et essayer de lui faire faire des apprentissages en communiquant avec lui à son niveau, au besoin en utilisant, au moins comme relais, des moyens de communications alternatifs à la parole. Ces moyens de communication permettent progressivement d'aider la personne autiste à mieux comprendre ce qui se passe autour d'elle, ce qu'on attend d'elle, mais aussi à exprimer ce qu'elle désire, ce qu'elle ressent.

Reconnaître l'autisme comme une forme de handicap mental

c'est le début du respect pour la personne autiste.

L'expérience montre que dès qu'on lui a donné des moyens de communication la personne autiste les utilise volontiers pour communiquer ce qui tendrait à abonder dans le sens que ce n'est pas le désir de communiquer mais les moyens de communiquer qui seraient insuffisants[6].

L'éducation des enfants autistes comporte donc un développement instrumental des moyens de communication. Ce développement passe par une structuration de l'espace et du temps. Il aboutira, par la suite à un apprentissage de la socialisation.

La structuration de l'espace et du temps

On va lui en faciliter la compréhension en commençant, dans un premier temps par simplifier son environnement et progressivement réintroduire de la complexité en fonction des progrès de l'enfant. Nous n'entrerons pas ici dans le détail de cette structuration du temps et de l'espace[7] qui permet à l'enfant de se repérer dans les  lieux et le déroulement des activités éducatives, récréatives, familiales, etc.  Nous signalerons simplement que pour un grand nombre d'enfants, et malheureusement d'adultes autistes, cette structuration sera leur première expérience du fait que le monde qui les entoure n'est pas qu'un vaste chaos...

Les apprentissages

Les apprentissages nécessaires aux enfants autistes sont pour la plupart fort semblables à ceux que l'on propose à tout enfant. La principale différence tient au fait qu'alors que pour les autres enfants une très grande partie de ces apprentissages se font de manière incidente, pour les enfants autistes, au moins au début, il sera nécessaire de les faire de manière explicite. Par exemple, là où un autre enfant va remarquer une analogie de situation sans avoir besoin qu'on la lui explique, un enfant autiste aura besoin qu'on la lui fasse remarquer[8].

Nous avons vu plus haut l'importance d'avoir une évaluation. Une des conséquences des disparités dans le profil psycho éducatif des enfants autistes est que l'on ne pourra pas avoir une approche homogène dans les différents domaines d'apprentissages. Certains seront à un niveau proche de l'âge chronologique, alors que d'autres correspondront à un âge développemental dépendant de l'évaluation particulière de ce domaine. C'est là que l'individualisation des prises en charges trouve principalement sa justification.

Enfin, une des particularités des enfants autistes, celle ci assez générale, est qu'ils ont des difficultés au niveau de l'intégration sensorielle ainsi qu'au niveau des sériations temporelles. On recommande donc lors d'apprentissages nouveaux de n'utiliser qu'un minimum de modalités sensorielles simultanées pour éviter une surcharge perceptuelle. On enrichira progressivement l'environnement sensoriel pour amener l'enfant petit à petit à savoir sélectionner les modalités sensorielles pertinentes de son environnement, dans un contexte particulier.

Pour ce qui est des difficultés de sériation temporelle, l'utilisation de modes de communication visuels aidera à donner une permanence au messages et à la structuration du temps. Cette préférence pour l'utilisation de la modalité visuelle semble assez générale dans l'autisme, toutefois il faut rester très vigilant et se référer aux évaluations spécifiques.

Les apprentissages généraux

En se fondant sur les hypothèses ci dessus, toute une série d'apprentissages généraux vont pouvoir être envisagés. En partant des pré-requis de base, orientation spatiale, coordination oculomotrice, imitation, etc. jusqu'aux connaissances usuelles, couleurs, vocabulaire de base, apprentissages pratiques divers vont être progressivement introduits dans le plan d'éducation. Le but ‚tant encore une fois de permettre à l'enfant, puis plus tard à l'adulte de pouvoir mieux comprendre le monde qui l'entoure, de le rendre plus prévisible et donc moins angoissant. N'est-il pas rassurant de savoir que si les arbres perdent leurs feuilles à l'automne, ils en auront de toutes neuves au printemps prochain? Essayez, juste à titre d'exercice personnel d'envisager comment vous pourriez expliquer cela à un enfant autiste n'ayant qu'une notion très limitée de la durée...

Il y a comme ceci des milliers d'apprentissages que nous avons faits, certains grâce à l'école, d'autres par déduction et généralisation, Piaget parlerait "d'abstraction réfléchissante".

Avec les personnes autistes, il est nécessaire de pratiquement tout leur apprendre, au moins dans les débuts. Avec les progrès instrumentaux qu'ils arrivent à faire, progressivement certains arrivent au stade de la déduction/généralisation, mais le plus souvent avec des difficultés énormes, et fréquemment des erreurs qui ne prêtent pas toujours à rire.

L'apprentissage de l'autonomie personnelle

Ces apprentissages seront à la base de l'autonomie individuelle. En cela ils revêtent un importance primordiale. Nous quittons là le domaine traditionnel de l'éducation scolaire. Ces apprentissages sont

généralement faits assez naturellement à la maison, dans le cadre familial. Avec les enfants autistes, il est le plus souvent difficile aux seuls parents de les prendre en charge.

Nous pensons que ces apprentissages pourront être faits au mieux grâce à une coopération parents-professionnels, par la mise en place de programmes éducatifs communs et coordonnés. Nous retrouvons ici l'importance de la participation des parents. Certains de ces apprentissages revêtent une importance cruciale car ils touchent à la sécurité des personnes elles mêmes et à celle de leur entourage.

Les apprentissages sociaux

Là encore, on ne se rend pas bien compte de la masse de connaissance que nous avons acquises au cours de notre vie, soit par des apprentissages directs, soit par la simple observation des comportements des autres en société. Si l'on tient compte des difficultés d'apprentissage des personnes autistes, on devra se rendre à l'évidence de la nécessité de leur apprendre les bases des comportements sociaux de manière à ce qu'ils puissent participer à la vie sociale, avec dignité, s'ils le veulent, et non d'en être coupés systématiquement par des lacunes importantes dans ce domaine.

Les apprentissages sociaux sont bien évidemment liés à l'âge de la personne autiste mais aussi à son environnement usuel. Un enfant vivant principalement en milieu urbain aura d'autres choses à apprendre qu'un enfant vivant principalement en milieu rural. Font partie de ses apprentissages les jeux et loisirs à caractère social. Ils seront souvent un facteur important de l'intégration de la personne autiste. Même si vous n'êtes pas un passionné de Football, pour un jeune garçon de dix douze ans, la compréhension des règles, et avoir vu des matchs à la Télévision avec lui  seront des connaissances sociales qui lui serviront avec ses copains...

Le cas des troubles du comportement

Les troubles du comportement[9] ne sont pas une caractéristique de l'autisme. En fait, une bonne prévention des troubles du comportement consiste en une approche éducative donnant à la personne autiste d'autres moyens d'exprimer une douleur, un désarroi, une incompréhension ou une frustration ou enfin d'attirer notre attention qu'en se cognant la tête contre les murs ou en donnant des coups de pieds ou en détruisant tout autour de lui.

Toutefois, même avec une approche éducative certains troubles du comportement persistent parfois. Ils sont le plus souvent dus à des difficultés de communication, réceptive ou expressive non encore complètement acquises. L'enfant ou l'adulte ne sait pas ce qu'on attend de lui, ne comprend pas ce qui se passe, ne sait pas nous dire qu'il a mal quelque part, etc.

Ce qu'il faut bien comprendre c'est qu'à l'inverse des approches Comportementalistes pures, une approche éducative structurée ne cherche pas à éliminer directement les troubles du comportement mais à offrir à la personne deux sortes de moyens de les éviter:

    1/ Lui proposer un environnement plus compréhensible compte tenu de son niveau de développement, en lui donnant des repères dans l'espace et dans le temps.

    2/ Lui proposer un programme éducatif qui lui permette de mieux comprendre son environnement ainsi que les modes de fonctionnement qui le caractérisent. Cela passe par un apprentissage de moyens de communication eux aussi adaptés au niveau de compréhension présent de la personne autiste.

Il est bien évident que au fur et à mesure que la personne autiste progresse dans son autonomie, elle aura besoin de moins en moins d'un environnement simplifié et que progressivement ses moyens

de communication vont s'enrichir. On adaptera donc les programmes éducatifs à son évolution de manière à l'amener au maximum de ses capacités. Le but étant de lui fournir l'environnement et les apprentissages les plus favorable à son épanouissement ainsi que des moyens de mieux comprendre les demandes et les désirs des autres et de mieux exprimer ses propres besoins et préférences.

L'expérience montre que plus de 90% des troubles du comportement sont ainsi évités, nous disons bien évités et non pas éliminés avec des méthodes comportementales. Il s'agit d'acquis durables puisque  fondés sur une meilleure compréhension de l'environnement et sur une meilleure capacité à exprimer ses propres besoins et à comprendre l'expression des besoins des autres. Ceci ne signifie pas que dans un cas comme dans l'autre cette compréhension doive déboucher sur un acquiescement. La relation sociale est faite de ces échanges où l'on doit parfois céder aux arguments de l'autre et réciproquement.

Nous visons pour les personnes autistes à leur fournir les moyens d'engager un dialogue, si élémentaire puisse-t-il paraître au début, un vrai dialogue où ils expriment eux mêmes leur propres désirs et non pas avoir à se fier aux interprétations subjectives des intervenants. Permettez nous de citer encore une fois notre position de principe:

Quand une personne autiste ne fait pas ce qu'on attend d'elle, avant de dire qu'elle ne veut pas, ou qu'elle met de la mauvaise volonté, il faut toujours se demander 

·       En premier lieu si elle a compris ce qu'on attend d'elle.

·       Deuxièmement, sachant qu'elle comprend notre attente, on doit se demander si elle sait faire ce qu'on attend d'elle.

·       Après s'être assuré qu'elle a bien compris notre attente et qu'elle est capable de le faire, et seulement après cela, on peut déduire qu'elle ne veut pas. Il convient alors d'essayer de comprendre pourquoi.

Il y a assez souvent une explication relativement simple. Ceci est important car ce refus peut nous aider à mieux comprendre cette personne, à mieux la respecter.

A ce niveau, connaissant la raison du refus, on pourra, en fonction de l'importance de l'action attendue, soit accepter ce refus comme une attitude légitime, soit essayer de faire comprendre l'importance de notre attente et essayer de motiver la personne autiste à la satisfaire.

Cette position est très importante dans la mesure où, très souvent, la personne ne sait pas nous faire comprendre ses propres difficultés, elle ne sait pas nous dire: "je ne comprend pas ce que tu veux" ni "Je ne sais pas faire ce que tu attends de moi", cela est justement sa difficulté. Or si nous pensons que cette personne ne veut pas faire ce qu'on attend d'elle, nous allons insister directement, sans nous rendre compte de l'inutilité de notre démarche puisque la personne ne comprend pas, tout au moins tant que nous continuons d'employer le même langage ou que nous n'essayons pas de nous assurer de sa capacité à accomplir ce que nous attendons d'elle. Une telle attitude conduit presque obligatoirement à une crise ou  à un repli encore plus profond. En acceptant son handicap, nous respectons son droit à la différence, en acceptant son droit à la différence nous lui donnons une chance de faire des progrès et d'utiliser au mieux ses potentialités.

L'intégration

Les personnes atteintes d'autisme, dont le handicap se manifeste plus particulièrement au niveau de la communication et de la compréhension des situations sociales, auront de ce fait des difficultés supplémentaires à être intégrées dans les activités sociales[10]. Sans une préparation à la fois de la personne autiste et de s personnes de son environnement, il est même parfois difficile de l'intégrer dans une institution pour personnes handicapées mentales non atteintes d'autisme.

A tout âge, l'intégration demandera deux interventions concourantes:

 * Une préparation de l'environnement, autant que faire se peut.

 * Une préparation de la personne par une démarche éducative appropriée, pour favoriser la socialisation.

Le rôle de l'éducation est de limiter le handicap en essayant de compenser par des méthodes adéquates les effets des déficits et des incapacités qui dans l'autisme ont un caractère social.

La finalité de l'intégration de la personne autiste

Dans le cas de l'autisme, on devra de plus se poser la question de savoir, quel que soit le mode d'intégration, si cette intégration apporte réellement quelque chose à la personne autiste. Un des aspects fondamentalement différents des autistes par rapport aux autre personnes non autistes est leur difficulté, voire leur incapacité à généraliser à partir d'expériences particulières. Ils ne feront probablement pas d'eux même la liaison entre des situations similaires rencontrées lors de plusieurs expériences d'intégration.

L'intégration des personnes autistes pose donc le problème supplémentaire de l'appréciation de la réalisation effective de cette intégration et non d'une apparence. Elle devra s'accompagner d'un complément éducatif de manière à suppléer les difficultés de généralisation.

Spécificité de l'autisme au niveau de l'intégration

Comme le montre bien le rapport du groupe de travail de la commission autisme de  l'UNAPEI sur la spécificité de l'autisme, certains des symptômes apparents dans l'autisme ont un impact immédiat sur

leur capacité à l'intégration sociale:

 * Résistance au changement.

 * Sensibilité extrême aux changement de stimuli

 * Peur panique de certains événements imprévisibles, spécialement ceux qui sont bruyants...

 * Problèmes d'abstraction, de généralisation.

 * Langage absent ou tardif et déviant.

 * Relations sociales perturbées

 * Communication difficile avec l'environnement, en particulier avec les gens et les animaux

 * Stéréotypies

Ce sont en particulier ces résistances au changement, ces difficultés d'adaptation sociale et ces difficultés de communication qui font la spécificité de l'autisme vis à vis des autres personnes handicapées mentales. Les stéréotypies, bien que présentes dans d'autres handicaps mentaux, constituent par leur intensité et leur fréquence chez les personnes autistes une gène considérable à l'intégration.

On peut donc dire, au sens de la nomenclature de l'OMS (Wood 1980) que l'autisme est une forme de déficience mentale provoquant des incapacités à la communication amenant en conséquence de très sévères désavantages au niveau social.

Ne jamais oublier qu'une des principales difficultés des enfants autistes est de généraliser de manière appropriée à partir d'expériences limitées. Or s'il est bien un domaine où il est difficile de généraliser, c'est bien celui des situations sociales. Il faudra essayer de trouver des indices situationnel qui  permettrons à l'enfant de se repérer dans les différentes situations usuelles. Par la suite on devra essayer d'élargir les situations et surtout de favoriser des aptitudes à la généralisation. Mais il faut bien commencer par des règles simples de manière à ne pas rajouter aux difficultés inhérentes à l'autisme un rejet supplémentaire du aux réactions sociales de l'entourage.

L'intégration scolaire

Dans le cas de l'autisme, les expériences d'intégration scolaires sont relativement récentes en France. En fait, l'idée même de scolarisation n'est pas toujours acceptée, loin de là. C'est pourquoi, nous avons  parlé d'intégration même dans le cas de structures comme les Instituts Médicaux Educatifs (I.M.E.).

Toutefois, quelle que soit le type d'intégration envisagé, les principes éducatifs évoqués dans le rapport sur les méthodes éducatives devront s'appliquer. Il est en effet moins important de savoir quelle  structure d'intégration prôner que de s'assurer de la qualité des prises en charges éducatives. Le choix de la structure peut s'imposer pour des raisons purement technique ou administratives. Nous ne  reviendrons pas ici sur ce que nous entendons par qualité des prises en charges éducatives.

L'adolescence: la préparation à la vie d'adulte

Si à l'âge scolaire les apprentissages sociaux ont un caractère plutôt complémentaire des apprentissages généraux, à l'adolescence, ils doivent progressivement devenir la préoccupation principale des prises en charges. Qu'il s'agisse de la préparation au travail ou de la préparation à la vie courante et aux loisirs, la personne autiste aura encore besoin de méthodes d'apprentissages adaptées à ses difficultés de communication et de généralisation.

La vie d'adulte

Contrairement au nom l'autisme infantile ne se limite pas à l'enfance. Les enfants autistes deviennent des adultes autistes. La qualité de la vie à l'âge adulte des personnes autistes est grandement influencée par les prises en charges durant l'enfance et l'adolescence. Elle est aussi influencée par la qualité des structures d'accueil et des prises en charges associées à ces structures.

Une des spécificités de l'autisme est qu'un besoin d'éducation va persister, même à l'âge adulte. Cela tient au fait qu'une des  caractéristiques de l'autisme, il faut le répéter sans cesse, est la très grande difficulté à découvrir les structures sous-jacentes et à généraliser les acquis. Il reste donc indispensable de continuer l'éducation, qui bien entendu prendra une forme adaptée à l'âge des personnes autistes. Faute de quoi, les apprentissages incidents ne se faisant pas ou mal, la personne autiste va se trouver en situation d'échec lors de changements de situations avec le risque de voir réapparaître des troubles du comportement. Dans tous les cas, ces difficultés d'apprentissage vont conduire à peu à peu à perdre des compétences

L'intégration dans le travail

Le travail peut avoir une plus ou moins grande valeur au niveau de l'intégration sociale en fonction de différents critères culturels ou familiaux. Dans le milieux français, on peut toutefois affirmer que le travail aura toujours un effet favorable comme facteur d'intégration sociale.

Les loisirs

La préparation des loisirs à l'âge adulte constitue la pierre d'achoppement de l'intégration des personnes autistes dans la société. S'il est relativement aisé de prévoir des apprentissages pour les loisirs individuels, bien que cela demande aussi des efforts éducatifs, il est très difficile de préparer les personnes autistes à des loisirs collectifs. Les loisirs collectifs sont cependant très important pour la continuation de l'épanouissement de la personne autiste.

Intérêt et limites de l'intégration des personnes autistes

Comme nous l'avons signalé en introduction, l'intégration sociale des personnes autistes doit être abordée avec encore plus de prudence que celle des autres personnes handicapées mentales. Elle nécessite, dans chaque cas de se poser les deux questions suivantes:

     Dans quel but essayons nous d'intégrer cette personne?

     Quelles sont les limites de cette intégration?

Dans le cas de l'autisme, l'intégration sociale constitue en elle même un but. Contrairement à d'autres formes de handicap mental, l'intégration sociale n'est pas un moyen d'apprentissage de la relation sociale et de l'autonomie. De plus, comme la personne autiste ne comprend pas la situation nouvelle où elle se trouve, cela provoque des angoisses et du stress qui vont se transformer en trouble du comportement, entraînant en conséquence un rejet, à plus ou moins court terme, du lieu d'intégration.

Il ne suffit pas d'intégrer une personne autiste dans une situation sociale pour voir émerger des compétences sociales. L'intégration devra permettre une généralisation des acquis mais cette généralisation ne pourra se faire qu'à l'aide d'un support éducatif, support qui devra être poursuivi tout au long de la vie de la personne autiste. Faute de quoi, comme les apprentissages ne se font pas naturellement, on assiste le plus fréquemment à une régression des capacités intellectuelles et sociales.

Il peut arriver, très rarement, qu'en apparence l'intégration se passe pour le mieux, aussi bien pour l'institution en charge de la personne, que pour les familles qui constatent une adaptation sans problème à la situation d'intégration. Cette satisfaction apparente peut elle être considérée comme suffisante pour la personne autiste? Nous ne le pensons pas. Elle peut en effet cacher un repli dans une routine fondée sur les acquis précédents, sans évolution personnelle, avec même perte des acquis sociaux s'ils cessent d'être utilisés dans la nouvelle situation.

C'est en ce sens que l'intégration sociale constitue un but permanent, jamais atteint mais dont on pourra s'approcher de plus en plus par des apprentissages structurés, tout au long de la vie de la personne autiste.

Paul Tréhin

    

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

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A.N.A.E. (Approche Neuropsychologique des Apprentissages chez l'Enfant). (1993 septembre et décembre) "n° spécial consacré à l'autisme". Vol 5, n° 3 et 4



[1] Nous verrons plus loin que cette notion même de guérison de l'autisme dans son ensemble, peut poser des questions éthiques, certains traits autistiques  faisant partie intégrante de la personnalité de l'individu qui doit être respectée.

[2] Il est important de signaler que certains hôpitaux psychiatriques font un travail tout à fait remarquable avec des enfants ou des adultes autistes. Il s'agit d'hôpitaux où l'autisme n'est pas abordé de manière psychanalytique. Ces derniers comprendront qu'ils ne sont pas concernés par ces critiques et que leur aide nous est précieuse.

[3] MAS : Maison d'Accueil Spécialisée, destinées à des cas de handicap très lourds.

[4] Cette discussion a eu lieu sur une liste de distribution électronique, E-Mail List en anglais, sorte de "boite aux lettres" permettant des échanges d'information entre membres d'un groupe de personnes ayant un intérêt commun, ici il s'agissait de la liste "AUTISM".

[5] Voir les recherches de B.Hermelin, N.O'Connor, sur les déficiences cognitives des enfants autistes dans: "Psychological Experiments with Autistic Children", (Pergamon Press, Oxford 1970), U.Frith, au Medical Research Council à Londre a récement confirmé ces études: "Psychological Abnormalities in Early Childhood Psychosis", (in Wing & Wing, Psychoses of Uncertain Aetiology)

[6] Nous ne parlons pas ici de la technique dite "Communication Facilitée"" dont la pratique est très controversée et demande la plus grande prudence quant à son utilisation.

[7] Voir les stratégies et activités éducatives proposées par le programme TEACCH ainsi que le livre de Theo Peeters sur ce sujet dans la biliographie.

[8] B.Hermelin et U.Frith ont étudié cette difficulté que les enfants autistes ont à comprendre l'environnement qui les entoure: "Psychological Studies of Childhood Autism: Can Autistic Children Make Sense of What They See and Hear", Journal of Special Education, 5, 1107-1117

[9] Un document pratique sur la prise en charge des troubles du comportement destin‚ aux parents et aux professionnels de terrain. Les principes de respect de la personne autiste y sont constamment rappelés.

[10] Ces quelques pages sont extraites d'un document très détaillé sur l'intégration des personnes autistes. Ce document est également disponible auprès d'autisme France sous forme de polycopié.